Bras de fer – Terres d’excavation : et maintenant

Mathias Delaloye, président de la Chambre valaisanne d’agriculture, et Gaëtan Reynard, président de l'AVE, font le point et dessinent des solutions ainsi que des modèles de collaboration.

L e 13 février 2025, le Grand Conseil adoptait, en deuxième lecture, une nouvelle loi cantonale sur les constructions. Si celle-ci prévoit de nombreux allègements de procédure bienvenus, notamment en matière d’installations énergétiques, les débats parlementaires ont été marqués par d’intenses discussions au sujet du traitement des terres d’excavation. Le cadre légal est en effet interprété de telle manière qu’il ne laisse en pratique aucune marge de manœuvre en termes de valorisation à l’échelle cantonale de la terre végétale d’excavation, matériau pourtant précieux et recherché, notamment pour des améliorations structurelles agricoles.


Il s’agissait, pour l’AVE, comme largement exprimé et relayé par constructionvalais, de thématiser une situation jugée absurde puisqu’elle conduit, faute de solutions de valorisation, nombre d’entreprises à déposer en décharge des terres propres [horizons A et B], polluant ainsi irrémédiablement le matériau déposé et la décharge elle-même.


Sa proposition de soumettre à un régime d’annonce – avec suivi pédologique – l’excavation de terres sur 1,5 m et jusqu’à 5000 m2, jugée extrême en termes de quantité par l’administration, a suscité des interrogations du côté des agriculteurs et de la Chambre valaisanne d’agriculture [CVA]. Cette dernière a fait une proposition plus nuancée – voir encadré – qui a été acceptée par le Parlement et est désormais inscrite dans la loi.


Dans ce que d’aucuns ont qualifié de match « agriculture – construction », les débats ont parfois glissé, démontrant une méconnaissance importante du rôle des deux branches en matière de respect des principes d’économie circulaire et de protection des sols.

Deux mois après les débats, le nouveau président de la CVA, également ancien président du Grand Conseil et député réélu en mars 2025, Mathias Delaloye, et le président AVE, Gaëtan Reynard, font le point et dégagent des solutions entrepreneuriales et pragmatiques.


Pour Mathias Delaloye, la proposition de la CVA portée au Parlement tient compte d’une crainte importante des agriculteurs, confirmée par près de 130 exploitants dans un sondage réalisé par la CVA, relative aux droits d’opposition qu’il convient de laisser au voisinage et qui viendraient à manquer dans une procédure d’annonce. De plus, les limites de profondeur proposées par l’AVE ne permettaient pas d’offrir une sécurité suffisante face au potentiel phénomène de « lac gelé », très craint, notamment par les viticulteurs. Cependant, il convient que « la problématique des terres d’excavation doit trouver des solutions pragmatiques. Si je peux tout à fait confirmer ne connaître aucune plainte formulée par un agriculteur envers un entrepreneur qui se serait montré indélicat, il est cependant clair que le Parlement, malheureusement, doit donner un cadre, notamment pour contrer les irrespectueux. Et il y en a, des deux côtés. »


Pour sa part, Gaëtan Reynard précise : « L’AVE cherche des solutions, précisément pour doter la branche de bonnes pratiques. La nouvelle loi propose quelques concessions, mais ne permet aucunement d’aborder la problématique dans son ensemble. Je suis cependant satisfait de constater que les pouvoirs politiques se sont emparés de cette thématique. »


Mathias Delaloye insiste : « Les intérêts de l’agriculture et ceux de la construction sont complémentaires dans ce dossier. Il est urgent que la confiance en les compétences professionnelles de nos entreprises et exploitations soit reconnue, également dans leur capacité à trouver les meilleures solutions, notamment en
termes de productivité et de rentabilité. »


Pour les deux présidents, il s’agit maintenant d’aller de l’avant et de proposer à l’administration des solutions qui tiennent compte de la réalité du terrain et des impératifs liés à la production agricole. Ainsi, il s’agirait par exemple de permettre des zones de stockage provisoire de matériaux terreux propres issus d’excavation. Ceci devrait être accompagné de règles précises en matière de maintien de la fertilité de telles terres, mais permettrait de mieux gérer les flux et ce, à l’échelle cantonale. Une collaboration tenant compte des besoins économiques des branches et un dialogue constant avec le Centre de compétences sols devraient ainsi être formalisés.


S’agissant des procédures à appliquer, les deux interlocuteurs s’accordent pour estimer que les autorisations de construire en matière de remblais et d’améliorations structurelles doivent d’abord faire l’objet d’un accord entre entreprise de construction, propriétaire foncier et agriculteur, puis le dossier devrait être soumis à un contrôle pédologique, lequel permettrait une décision de l’autorité cantonale.


Et chacun de plaider pour une utilisation de la clause du besoin agricole par l’administration de la manière la plus adéquate possible, à savoir qu’un tel besoin ne peut se résumer à un besoin économique.

Que dit la loi ?

Les alinéas 4 et 5 de l’article 44 de la Loi cantonale sur les constructions du 13 février 2025 précise ce qui suit :

Art. 44

Dispense d’autorisation de construire selon la présente loi

4. Les modifications du sol naturel, en dehors de la zone à bâtir, résultant de l’apport de matériaux terreux n’excédant pas une surface de 2’000 m² ni une hauteur de 50 cm, sont dispensées de l’autorisation de construire. Ces opérations doivent néanmoins être soumises à la procédure d’annonce conformément à l’article 48 de la présente loi. Les conditions et la procédure applicables sont définies dans l’OC.

5. Ne sont soumises ni à autorisation de construire ni à procédure d’annonce selon la présente loi, à l’extérieur de la zone à bâtir et uniquement pour les parcelles non classées en surface d’assolement, les modifications du sol naturel (remblayage et excavation) n’excédant pas une surface de 500 m² et/ou une hauteur respectivement une profondeur de 100 cm.

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